Précieuse Brillance
Une œuvre de Nathalie JUNOD PONSARD
Place de l’Europe - Simone VEIL
Une médiation culturelle, Arts Pass Médias
« L’œuvre se révèle à certains moments par la lumière du soleil, et la nuit par notre interaction avec celle de nos phares » Nathalie Junod Ponsard
L’œuvre & son contexte
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PRÉCIEUSE BRILLANCE Œuvre lumineuse de Nathalie Junod Ponsard
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L’histoire de la Place de l’Europe-Simone Veil
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C’est quoi l’Europe ? L’Union européenne pour tous…
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Simone Veil & l’Europe
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Discours de Simone Veil au Parlement européen, le 17 juillet 1979
PRÉCIEUSE BRILLANCE
Œuvre lumineuse de Nathalie Junod Ponsard
Place de l’Europe – Simone Veil
EMBELLIR PARIS
Dans le cadre du projet Embellir Paris, la place de l’Europe - Simone Veil dans le 8ième arrondissement accueille dès le 29 août 2019 Précieuse brillance, une œuvre de lumière de l’artiste internationale Nathalie Junod Ponsard. Tout juste quarante ans après la Présidence de Simone Veil au Parlement Européen en 1979, Nathalie Junod Ponsard crée en hommage à cette grande personnalité de la vie politique française, européenne engagée et figure du combat pour le droit des femmes, un collier de perles brillantes de 36 mètres de circonférence tout autour du rond-point qui porte son nom. Centre d’impulsion de tout un quartier, cette place suspendue au-dessus des rails d’où rayonnent des rues aux noms de grandes capitales européennes (rue de Vienne, de Madrid, de Constantinople, de Saint-Pétersbourg, de Liège et de Londres), soumise aux flux effervescents de la gare Saint Lazare, des véhicules et des passants se transforme avec Précieuse brillance en un écrin coloré de scintillements et lumières. L’œuvre aux 433 « disques de lumière », incrustés de perles de verre rétro-réfléchissantes cerne le cercle central de ses « réflecteurs » singuliers de couleurs tour à tour bleu, jaune, blanc, rouge et vert. De jour comme de nuit, la fluidité du rythme coloré et lumineux s’engage : le vert devient rouge qui à son tour se teinte de jaune, celui-ci passe au bleu qui appelle au jaune, se change en blanc, puis revient au bleu du ciel le jour et en bleu nuit dans l’obscurité. Des disques de couleur bleue, aux jaunes d’or similaire aux étoiles de l’unité des peuples européens, l’agencement des couleurs n’est pas sans rappeler celui du drapeau de l’Union européenne, dont la pureté du rêve de paix scintille en des disques de perles blanches, et illumine à ses côtés, des touches de rouge et de vert, tel le fruit mûr dans un arbre que l’on cueille, et cette nature que nous nous devons de protéger. Une nature investie au centre de la place par la présence de plantes organiques. A cette juxtaposition de couleurs et de symboles, c’est aussi à la lumière que l’artiste fait appel et à sa capacité d’iriser chacune de ces précieuses perles. Le blanc scintillant n’est pas sans évoquer le diamant, les bleues et jaunes, les saphirs et topazes alors que de l’autre côté du cercle se sont les émeraudes qui côtoient les rubis. En écho à ce quartier prisé des Impressionnistes au 19ème siècle pour l’atmosphère lumineuse de sa gare aux volutes de fumées teintées de multiples couleurs et aux lueurs chromatiques irisant jusqu’à l’architecture de son pont, Nathalie Junod Ponsard livre sur ce site, une ode nouvelle à la lumière en termes de couleurs et de scintillements. Dans une démarche propre à ses œuvres et à ses autres installations, l’emploi de longueurs d’ondes modifie la densité du site investi, déstabilise nos repères perceptifs et propose par la lumière une approche singulière de la réalité fugitive. Tout comme les Impressionnistes à la recherche d’une plus grande luminosité dans leurs couleurs, qui peignaient par juxtaposition de touches en un subtil mélange optique, Nathalie Junod Ponsard peint avec des perles de verre dont l’ensemble des touches de couleurs ou contrastes de longueurs d’ondes produit des tonalités vibrantes, variant selon l’intensité lumineuse. Peindre avec des billes de verre colorées, c’est comme peindre avec des touches juxtaposées de couleur mais c’est aussi peindre avec la lumière et l’utiliser comme médium. Sans aucune consommation d’énergie extérieure, en un seul dialogue intime avec l’espace urbain, les perles de verre et leurs couleurs captent la luminosité environnante, nous renvoient leurs brillances, parfois exacerbées, vibrent selon la lumière naturelle du jour ; augmentent ou diminuent d’intensité selon la position et le déplacement des passants, de la circulation ambiante et se jouent dès la tombée de la nuit de la lumière urbaine et des flux de phares qui l’encerclent. L’œuvre épouse le cercle, comme un disque, elle est cercle et unité, signe de perfection. Panoramique, elle entraine les passants à se déplacer tout autour de la place pour saisir son essence. Précieuse brillance entame alors avec l’atmosphère de la place une danse aux variations scintillantes et aux vibrations colorées. Elle s’offre aux regards en des mouvements ondulatoires en une expérience sensitive de l’espace et du temps, où tout un chacun fait l’œuvre. Nourrie de ces interactions multiples, l’œuvre dote la place de l’Europe-Simone Veil, de l’énergie lumineuse de tout un quartier. Avec Précieuse brillance, c’est un épicentre au rayonnement de l’Europe qui se vit, un quartier historique et culturel qui renait, un espace urbain qui est mis en valeur, une artiste qui s’exprime, des passants qui repartent avec des étoiles plein les yeux et un imaginaire culturel qui se crée, celui d’une Europe culturelle unie.« L’artiste remercie la société J.H Signalisation »Précieuse brillance de Nathalie Junod Ponsard, détail de l’œuvre in situ, jour. © Guillaume Thomas
Précieuse brillance de Nathalie Junod Ponsard, œuvre in situ, nuit. © Guillaume Thomas
Maquettes de l’œuvre © Nathalie Junod Ponsard
Précieuse brillance de Nathalie Junod Ponsard, détail de l’œuvre in situ, jour. © Guillaume Thomas
Esquisse de l’œuvre, © Guillaume Thomas
Plan de situation de l’œuvre, Place de l’Europe Simone Veil
L’histoire de LA PLACE DE L’EUROPE - SIMONE VEIL
Du terrain vague au quartier de l’Europe : sa gare, son pont et sa place
Au début du XIXe siècle, ce quartier nommé « petite Pologne » qui s’apprête à devenir le quartier de l’Europe, n’est qu’un terrain vague parsemé de ruelles mal bâties, tapi de boue et de fumier et peuplé de chiffonniers, pépiniéristes, ferrailleurs et d’homme de peine venus de tous les points d’Europe.Martial-Potémont
Petite-Pologne : Destruction pour le boulevard Malesherbes, 1861, eau-forte, 1862, BnF/Gallica.
Disparition du quartier de la Petite-Pologne, ici pendant les travaux d’ouverture du Boulevard MalesherbesEn 1824, deux hommes, Jonas Hagerman et Sylvain Mignon anticipant le développement urbain de Paris, rachètent toutes les parcelles de la zone afin de créer un nouveau quartier de lotissements résidentiels qui s’ordonnera en un plan en étoile centré sur la place de l’Europe.Carte de la Place de l’Europe, Archives de Paris, Ville de Paris
Emprises détenues par Hagerman et Mignon, dans les années 1830Plan de la Place de l’Europe & du quartier par Jacoubet, 1836, Ville de Paris
En 1837, la Reine Amélie épouse de Louis Philippe (Roi des Français entre 1830 et 1848) inaugure à quelques mètres de la place, la première ligne de chemin de fer de la capitale, la ligne de Paris à Saint-Germain-en- Laye. Son « embarcadère » comme on l’appelait alors, était situé rue de Londres, près de la place de l’Europe. Dès lors, la gare Saint-Lazare ne cessera de se développer et les lignes de se multiplier.Installée depuis 1837, La gare Saint Lazare, Renard,
Plan pittoresque de la ville de Paris, 1842, Gallica/BnFGallica/BNFEn 1843, Paris est reliée à Rouen, puis la ligne est prolongée jusqu’au Havre. En 1858, Napoléon III inaugure la ligne Paris-Caen-Cherbourg, tandis que toutes les villes de la banlieue francilienne sont desservies : Nanterre, Pontoise, Argenteuil, Asnières… Dès 1867, les installations de la gare occupent toute leur surface actuelle circonscrite par la rue St-Lazare, la rue d’Amsterdam, la rue de Londres et la rue de Rome. Quant à la place de l’Europe située sur ce viaduc, « suspendue au-dessus des voies », elle accueille en un dessin en croix à 6 branches, un pont métallique sur 4 piliers de chacun des côtés. De ce plan unique rayonne 6 rues aux noms de grandes capitales européennes : la rue de Vienne, la rue de Madrid, la rue de Constantinople, la rue de Saint-Pétersbourg, la rue de Liège et la rue de Londres. Même si le projet de la place de l’Europe est plus ancien, c’est ainsi tout un quartier : réseau viaire & ferré qui sort de terre rapidement en une étonnante cohérence. L’ensemble de l’ouvrage est conçu par Emile Cail pour l’exposition universelle, également impliqué dans les constructions mécaniques de matériel roulant pour le rail. En 1875, tout autour de la place de l’Europe, de beaux immeubles au style Haussmannien voient le jour.Le Pont de l’Europe et la gare en 1888, Ville de Paris
Vue aérienne, Place de l’Europe et la Gare Saint-Lazare, 1919, Commission du Vieux Paris,
Ville de ParisSi le nom même de la place ou plutôt de ce carrefour appelle au voyage, ces axes autour de la rue de Vienne, rue de Madrid, rue de Constantinople, rue de Léningrad à nouveau baptisée rue de Saint-Pétersbourg, rue de Liège (ex rue de Berlin), rue de Londres offrent un véritable parcours à travers l’Europe d’une rue à l’autre…avec au milieu du quartier, la place de l’Europe – Simone Veil.La place de l’Europe porte le nom Simone Veil
En octobre 2017, la place de l’Europe devient la place de l’Europe Simone Veil pour rendre hommage à cette grande personnalité de la vie politique française, européenne engagée et figure du combat pour le droit des femmes. « Avec son décès le 30 juin 2017, la France a perdu l'une de ses plus belles figures d'engagement », indique la Ville de Paris et sa Maire Anne Hidalgo rappelle que Simone Veil, déportée à Auschwitz, a été « la première femme à occuper le poste de secrétaire générale du Conseil supérieur de la magistrature » et, en portant la loi dépénalisant l'interruption volontaire de grossesse, est devenue « une figure emblématique de la lutte pour les droits des femmes. » Première femme élue présidente du Parlement européen, elle a consacré « une grande partie de sa vie à porter les valeurs fédéralistes et à faire avancer la construction d'une Union européenne à la fois plus forte et plus juste. » « Au-delà de son engagement politique, sa force de caractère et sa finesse d'esprit lui ont conféré une place unique dans l'esprit et dans le cœur des Français. » La Ville de Paris « tient à ce que Paris, les Parisiennes et les Parisiens, puissent rendre hommage durablement à cette femme d'exception. »![]()
La place de l’Europe et son dialogue intime avec les artistes
Au 19ième siècle - Les peintres Impressionnistes dans le quartier de l’Europe*
Impressionnistes !... Le nom donné à ce mouvement par le journaliste du Charivari Louis Leroy provient d’un tableau de Monet « Impression Soleil levant » exposé le 15 avril 1874 chez le photographe Nadar. Leur période de production dure une vingtaine d’année de 1855 à 1875, pendant lesquelles des artistes tels que Monet, Sisley, Pissaro, Degas, Cézanne, Renoir, Manet… rompent définitivement avec les manières de faire qui les ont précédés. L’unité de la toile n’est plus fondée sur la composition (tracé, perspective, géométrie des formes…), sur le contraste ombre/lumière, ton gris ou colorés mais sur une facture nouvelle et le traitement de toute la surface du tableau en vibrations colorées. La vibration colorée affecte tout l’espace, tous les objets, personnages, nature, architecture en des tons francs et sonores, et la juxtaposition d’éléments colorés s’exaltant mutuellement. Un procédé pictural qui tend à diluer les formes dans une vapeur colorée, dans une matière vibrante et lumineuse. Et, si l’image devient floue, si le contour perd de sa précision par la juxtaposition de couleurs, il ne disparaît pas. Leur style peut se définir comme une sensibilité à la lumière des formes, à ses irisations et ses infinies variations, au mouvement qui les anime et en interdit la définition exacte et figée. Rapidement et tout naturellement, ces peintres vont sortir leurs chevalets des ateliers sombres et peindre d’après nature, à la recherche de points de vue insolites, au plus proche du motif choisi. Au XIXème siècle dans le 8ième arrondissement de Paris, la gare saint Lazare est l’attraction du quartier. Cette gare, les Impressionnistes la fréquentent souvent, c’est elle qui les mène en Normandie, ou, plus près, sur les bords de Seine. Caillebotte, Monet, Manet, Gœneutte, Anquetin… certains d’entre eux résident dans le quartier de l’Europe ou transitent régulièrement par Saint Lazare. Et, ils seront nombreux à élire la place de l’Europe, son pont métallique ou sa gare comme motifs. Avec ses rues en étoile et son alignement parfait, le quartier de l’Europe offre des lignes de fuite, une architecture, une atmosphère et une vue spectaculaire sur les voies. Suivant la météo et la lumière, de doux reflets bleutés, violacés se fondent sur les vapeurs de fumée des locomotives. Les passants s’arrêtent derrière le pont métallique en croix pour contempler l’arrivée ou le départ des trains. On le retrouve ici dans le cadrage étonnant de Caillebotte et de son œuvre Place de l’Europe, une toile à la composition plastique emprunte de la photographie.Gustave Caillebotte, Sur le pont de l’Europe, vers 1876-1880, Kimbell Art Museum, Fort Worth.
Monet, lui, installé depuis 1871 à Argenteuil emprunte souvent le train pour se rendre à Paris. Il obtiendra aussi grâce à l’aide de Caillebotte qui y habite, un petit appartement au 17 rue Moncey, à deux pas de la gare où il peut y entreposer ses toiles et son matériel. En 1876, l’artiste peint Vue intérieure de la gare Saint-Lazare avec ses volutes de fumée qui s’élèvent sous la halle métallique et se teintent de différentes couleurs. L’atmosphère de toute une époque.Claude Monet, Vue intérieure de la gare Saint-Lazare, ligne d’Auteuil, 1877, Musée d’Orsay
Avec la gare Saint-Lazare, Monet signe l’une de ses séries les plus célèbres et produit en quelques mois une douzaine de toiles du quartier : il peint six fois la halle métallique de la gare, mais contrairement à ses séries comme celle des cathédrales, il déplace son chevalet à chaque séance et change de point de vue. L’on y découvre les dessous du Pont. Ce qui l’intéresse c’est l’effervescence de la gare, l’ambiance lumineuse, le soleil qui perce et qui irise les fumées de vapeur, l’architecture métallique des bâtiments, l’alignement des rails formant un réseau de lignes fortes qui structurent le paysage. Zola dira de cette série :«(…) intérieurs de gare superbes. On y entend le grondement des trains qui s’engouffrent, on y voit des débordements de fumées qui roulent sous de vastes hangars. Là est aujourd’hui la peinture… Nos artistes doivent trouver la poésie des gares, comme leurs pères ont trouvé celle des forêts et des fleuves. » Dix ans plus tard, l’écrivain, à son tour, dévoilera dans La Bête humaine, le paysage moderne de la Gare Saint-Lazare et de ses alentours. Avec Manet et Le Chemin de fer réalisé entre 1872-1873, le peintre s’intéresse au contraste entre la vie des riverains et l’effervescence de la gare. Deux figures se détachent sur une grille de métal. Une petite fille, agrippée aux barreaux de la grille, happée par les volutes des locomotives nous tourne le dos. Peut-être pour mieux nous exprimer la fascination que la gare peut véhiculer…Edouard Manet, Le Chemin de fer, 1872-1873, National Gallery of Art, Washington
* Manet, Monet, La Gare Saint Lazare, catalogue d’exposition, Juliet Wilson-Bareau, Réunion des musées nationaux - 1998Eté 2019 - Précieuse brillance, une œuvre de lumière de l’artiste Nathalie Junod Ponsard pour la place de l’Europe – Simone Veil dans le cadre du projet Embellir Paris.
Tout juste 40 ans après la Présidence de Simone Veil au Parlement européen et près de deux siècles après les Impressionnistes, Nathalie Junod Ponsard offre à la place, une œuvre comme un collier de perles scintillantes aux couleurs de l’Europe.
C’est quoi l’Europe ? L’Union européenne pour tous…
Selon la légende, Europe était une princesse phénicienne qui aurait séduit Zeus, roi de l’Olympe. Le dieu, métamorphosé en taureau, l’aurait enlevée pour la conduire en Crète où elle aurait donné naissance au légendaire roi Minos. Au 20ième siècle, Le continent européen avec ses millions de morts a été dévasté par deux guerres mondiales (1914-1918 et 1939-1945). Dès 1951, 6 pays la France, l’Allemagne, l’Italie et les pays du Bénélux (Belgique, Luxembourg, Pays-Bas) comprennent que seule une union entre les pays d’Europe assurera une paix durable et permettra à l’Europe de retrouver son rang sur la scène mondiale. L’union des 6 pays s’élargira ensuite par adhésions successives avec l’entrée du Danemark, de l'Irlande et du Royaume-Uni en 1973, de la Grèce en 1981, puis de l’Espagne et du Portugal en 1986, de l’Autriche, la Finlande et la Suède en 1995, de Chypre, de l'Estonie, de la Hongrie, de la Lettonie, de la Lituanie, de Malte, de la Pologne, et de la Slovaquie, mais aussi de la Slovénie, et de la République Tchèque en 2004, suivront la Bulgarie et la Roumanie en 2007 et enfin la Croatie en 2013. A cet espace, on a donné en 1992 le nom d’Union européenne et depuis plus de 50 ans ce rêve d’Union s’est réalisé. Sa devise est « Unie dans la diversité ». D'après la Commission européenne, « cette devise signifie que, au travers de l'Union européenne, les Européens unissent leurs efforts en faveur de la paix et de la prospérité, et que les nombreuses cultures, traditions et langues différentes que compte l'Europe constituent un atout pour le continent. ». Elle nous rappelle que tous les européens doivent être à la recherche d’un idéal à atteindre afin de réaliser dans des bonnes conditions des objectifs et des projets communs entre tous ses membres. Elle a été créée pour permettre à tous ses habitants de vivre mieux. Aujourd’hui ce sont 28 pays qui la composent. Et, jour après jour ils essayent de se mettre d’accord sur des règles de vie commune. Comment aider les pays qui ont des difficultés économiques ? Comment aider les entreprises et travailleurs ? Que faire pour l’environnement ? Toutes ces questions sont abordées entre autres par le Parlement européen dont la première Présidente élue en 1979 fut Simone Veil. Si ce n’est déjà pas facile pour un seul pays de résoudre toutes ces questions alors à 28 c’est parfois très compliqué, notamment pour allier représentation des Etats et des populations dans la décision, fondement du fonctionnement européen. Mais malgré les difficultés, il ne faut pas oublier le rêve de paix du début… L’Union européenne s’est donc dotée d’autres symboles fédérateurs : une fête, un drapeau et un hymne afin d’assurer une reconnaissance par tous de cette union. La Journée de l'Europe, célébrée le 9 mai dans les États membres de l'Union européenne est considérée comme la fête de l’Europe depuis 1985 mais a également été instituée pour commémorer la Déclaration Schuman du 9 mai 1950. Ce discours, prononcé avant la naissance de la Communauté économique européenne, est considéré comme le texte fondateur de l’Union européenne. Elle symbolise aussi la paix entre la France et l'Allemagne, qui toutes deux décidèrent de coordonner l'ensemble de leur production de charbon et d'acier sous l'égide d'une Haute Autorité, dans une organisation ouverte à la participation des autres pays d'Europe. Le drapeau européen est constitué d'un cercle d'étoiles dorées sur un fond bleu. Il est plus couramment associé à l'Union européenne autrefois Communauté européenne, qui a adopté le drapeau dans les années 1980 même s’il a d'abord été créé par le Conseil de l'Europe en 1955. Quant à son hymne, il s’agît de l'Ode à la joie, dernier mouvement de la Neuvième symphonie écrite par Ludwig van Beethoven en 1823 et qui est l’hymne actuellement utilisé à la fois par le Conseil de l'Europe et par l'Union européenne.Le drapeau de l'Union européenne
Les pays de l'Union européenne
L'Union européenne compte 28 pays (Etats membres) : l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, la Bulgarie, Chypre, la Croatie, le Danemark, l'Espagne, l'Estonie, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l'Irlande, l'Italie, la Lituanie, la Lettonie, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la République tchèque, la Roumanie, le Royaume-Uni, la Slovaquie, la Slovénie et la Suède.Source : Toute L’Europe.eu
Suite au référendum du 23 juin 2016 en faveur du Brexit, le Royaume-Uni est engagé dans un processus de séparation de l'UE. Initialement prévue le 29 mars 2019, la sortie du pays a été repoussée.Construction de l’Union européenne
Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les initiatives en faveur d'un rapprochement des peuples d'Europe se multiplient. Entre le 7 mai et le 10 mai 1948, les différents mouvements d’opinion pro-européens se réunissent à La Haye sous la présidence d’honneur de Winston Churchill alors Premier ministre britannique. Le 9 mai 1950, Robert Schuman, alors ministre français des affaires étrangères, propose la création d’une communauté européenne du Charbon et de l’Acier (CECA) dans l’espoir qu’une coopération économique assurera la paix entre ces pays membres. Dès 1951, lors du traité de Paris, 6 pays la France, l’Allemagne, l’Italie et les pays du Bénélux (Belgique, Luxembourg, Pays-Bas) fondent la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier (C.E.C.A) dans le but de rendre l’Europe plus autonome économiquement. L’idée est également « d’édifier un socle économique, susceptible de permettre des formes de coopération politique ». Le 25 mars 1957 à Rome, l’Allemagne de l’Ouest, la Belgique, la France, l’Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas signent à 6, la naissance de la Communauté économique européenne (CEE). Le traité fondateur de la Communauté Economique Européenne dit traité de Rome élargira les compétences de cette communauté naissante afin d’établir « une union sans cesse plus étroite entre les peuples européens », « dans le but d’assurer le progrès économique et social de leurs pays », « d’améliorer le niveau de vie et d'emploi de leurs peuples », « d’assurer la concurrence et de réduire les écarts de richesse entre les régions et enfin de soutenir les régions défavorisées ». L'objectif est la constitution d'un marché commun et d'une union douanière entre les pays membres. La CEE comporte alors quatre institutions : une Commission, un Conseil des ministres, une Assemblée parlementaire et une Cour de justice. En 1962, c’est la mise en place d’une politique agricole commune (PAC) et les droits de douane sont éliminés entre les six pays fondateurs le 1er janvier 1968. Le premier élargissement des Communautés a lieu en 1973 avec l’adhésion du Royaume-Uni, de l’Irlande et du Danemark. D’autres suivront de 1981 à 2013 pour intégrer l’ensemble des 28 membres qui composent aujourd’hui l’Union européenne. En 1979, les membres de l’assemblée du Parlement européen sont élus pour la première fois au suffrage universel direct, avec pour Présidente : Simone Veil. Puis l’accord de Schengen est signé en 1985 : il instaurera dix ans plus tard un espace de libre circulation des personnes à l’intérieur des frontières européennes. En 1986, l’Acte Unique est la première grande réforme des institutions. Il généralise pour les questions touchant au marché intérieur, aux libertés de circulations, le vote à la majorité qualifiée au Conseil. C’est à dire la possibilité avec 2/3 ou les 3/4 des votes des représentants élus du peuple ou la majorité claire de la population, qu’une procédure soit approuvée. Dans cette même dynamique, il renforcera aussi le rôle du Parlement européen. Le traité de Maastricht en 1992, crée l'Union européenne et permet en 2002 la mise en circulation de l'euro dans un certain nombre de pays membres. Le 23 juin 2016, les Britanniques ont voté majoritairement en faveur du Brexit. C’est la première fois qu’une procédure de sortie de l’un des membres de l’union est engagée.Les objectifs de l’Union européenne
Les objectifs de l’Union européenne sont énumérés à l’article 3 du traité sur l’Union européenne (TUE). L’union Européenne contribue "à la paix, à la sécurité, au développement durable de la planète, à la solidarité et au respect mutuel entre les peuples, au commerce libre et équitable, à l'élimination de la pauvreté et à la protection des droits de l'homme, en particulier ceux de l'enfant, et de l’égalité hommes/femmes ainsi qu'au strict respect et au développement du droit international, notamment au respect des principes de la charte des Nations unies".Qui prend les décisions ?
Quatre des sept institutions de l'UE interviennent dans la plupart des décisions européennes : la Commission, le Parlement, le Conseil de l'UE et le Conseil européen. Les trois autres sont la Banque centrale européenne, la Cour de Justice de l'Union européenne et la Cour des comptes européenne. L’Union européenne est par ailleurs dotée de nombreux autres organes et agences, comme le Comité des régions ou encore le Comité économique et social européen.Source : Toute L’Europe.eu
Le Conseil européen regroupe, au moins quatre fois par an à Bruxelles, les 28 chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne. Les dirigeants y décident des grandes orientations de l’Union européenne. Par ailleurs, lorsque les autres institutions ne parviennent pas à s’accorder sur un texte, il arrive souvent que le Conseil européen se réunisse pour le débloquer. La Commission européenne, elle, propose les textes de loi. Elle suit alors les recommandations du Conseil européen ainsi que son propre agenda. Composée d’un commissaire européen par Etat membre, elle se réunit au complet au moins une fois par semaine à Bruxelles. Entretemps, chaque commissaire avance sur ses dossiers respectifs. Enfin, les propositions de la Commission sont, dans la plupart des cas, amendées et votées par le Parlement européen et le Conseil de l'Union européenne. Avec ses 751 députés élus au suffrage universel direct, le Parlement européen représente les peuples européens et se réunit au moins une fois par mois à Strasbourg pour voter les textes de loi. Le Conseil de l’Union européenne, lui, rassemble régulièrement les ministres des Etats membres à Bruxelles. Pour que la proposition de loi soit adoptée, le Parlement et le Conseil de l'Union européenne doivent s’accorder sur un texte commun. Une fois validée par l'Union européenne et après un délai pour que chaque Etat l'intègre dans son droit national, la loi s’applique partout dans les pays membres. Le processus décrit ci-dessus est appelé "procédure législative ordinaire", mais il existe également d’autres processus en fonction des domaines concernés. En matière de politique étrangère ou de fiscalité par exemple, le Parlement européen a beaucoup moins de pouvoir que le Conseil de l'Union européenne, qui lui-même prend alors ses décisions à l'unanimité et non plus à la majorité qualifiée.
SIMONE VEIL & L’EUROPE
Première femme présidente du Parlement européen en 1979, figure incontournable de l’Europe, Simone Veil incarne aussi bien d’autres combats : la lutte contre l’antisémitisme, la lutte pour les droits des femmes et la loi sur l’IVG… Son engagement sans faille pour l’Europe résonne avec son histoire personnelle en une intime conviction : la volonté de rapprocher les peuples européens comme seule solution au maintien de la paix. Pour elle, il est de notre « responsabilité de maintenir, quelles que soient nos divergences, cette paix qui est probablement, pour tous les Européens, le bien le plus précieux ». Son discours d’intronisation en tant que Présidente du Parlement européen représente sa vision de l’Europe : « Pour relever les défis auxquels l’Europe est confrontée, c’est dans trois directions qu’il faudra l’orienter : l’Europe de la solidarité, l’Europe de l’Indépendance, l’Europe de la coopération ». Au cours de son mandat, elle s’évertue avec détermination à faire connaître le Parlement européen auprès de l’opinion publique et à développer son importance dans les décisions européennes. Elle contribue ainsi à lui donner un rôle politique réel, et « d’impulsion dans la construction communautaire ». Pendant sa présidence, elle engage aussi l’institution dans une logique d’élargissement de l’Union Européenne. Simone Veil quitte la Présidence du Parlement européen en 1982 mais continue d’exercer des fonctions importantes comme députée européenne pendant 14 ans. Construire une Europe plus solide constitue pour elle une priorité. Elle défend le rapport d’Altiero Spinelli (figure de proue du fédéralisme européen) qui promeut la création d’une Europe fédérale. Et elle soutient par la suite le traité de Maastricht, devant créer l’Union européenne lors du référendum français de 1992, tout comme les différents élargissements de l’Union européenne avec l’entrée de la Grèce, du Portugal et de l’Espagne. Ce n’est qu’en 1993 qu’elle quitte le Parlement européen pour devenir ministre des Affaires sociales au sein du gouvernement d’Édouard Balladur (1993-1995), mais son implication pour la cause européenne se prolongera jusqu’à la fin de sa vie. Inquiète de la montée des tendances nationalistes et donc de la possible fragilisation de l’Union européenne, elle intervient en public en 2005 en faveur du traité établissant une constitution pour l’Europe : « L’Europe construite patiemment pendant des décennies peut demain se déliter. Ce que les hommes ont construit avec application, d’autres peuvent le détruire. » Depuis juillet 2018, Simone Veil repose avec son époux, au Panthéon, au sein du caveau VI, celui des résistants Jean Moulin et André Malraux, du père fondateur de l’Europe Jean Monnet, et du prix Nobel de la paix René Cassin.
Discours de Simone Veil (Strasbourg, 17 juillet 1979)
Le 17 juillet 1979, lors de la première session du premier Parlement européen élu au suffrage universel direct, Simone Veil, élue Présidente de l'Assemblée, prononce un discours qui met l'accent sur le rôle moteur du Parlement dans la poursuite de la construction européenne.
Mes chers Collègues, Mesdames, Messieurs, c’est un très grand honneur que vous m’avez fait en m’appelant à la présidence du Parlement européen. Aussi l’émotion qui est la mienne en prenant place à ce fauteuil estelle plus profonde que je ne saurais l’exprimer. Avant toute autre chose, je souhaite en remercier toutes celles et tous ceux d’entre vous qui ont porté leur suffrage sur mon nom. Je m’efforcerai d’être le président conforme à leur voeu. Je m’efforcerai aussi, conformément à l’esprit de la démocratie, d’être le président de toute l’Assemblée. Si la séance d’aujourd’hui se déroule dans un cadre qui, pour beaucoup d’entre vous, est familier, elle n’en revêt pas moins un caractère historique. Sans doute est-ce là ce qui explique à la fois l’affluence et la qualité de ceux qui se sont rendus aux invitations envoyées. Sans pouvoir à cet égard citer toutes les personnalités présentes, et je m’en excuse, je leur adresse, au nom de chacun de ses membres, le salut de notre Assemblée. Nous avons ainsi le très grand honneur d’avoir parmi nous de nombreux Présidents de Parlements de pays associés et tiers, représentant des peuples de cinq continents et qui, par leur présence ici, apportent un soutien inestimable à notre construction démocratique en témoignant de l’importance qu’ils attachent aux relations avec notre Parlement. Nous apprécions hautement, Madame et Messieurs les Présidents, que vous ayez accepté notre invitation, nous apprécions hautement votre geste d’amitié et de solidarité et je vous en remercie ici tout particulièrement. J’ai exprimé hier soir la gratitude que nous devons avoir à l’égard de Louise Weiss, qui a si bien guidé nos premiers pas. Vous me permettrez d’y revenir d’un mot, sans vous formaliser que je cite la part éminente qu’elle a prise dans toutes les luttes menées pour l’émancipation de la femme. C’est pour moi un devoir, mais c’est aussi un honneur que de rendre hommage à l’Assemblée qui a précédé la nôtre, et plus précisément à ses présidents successifs, qui ont dirigé ses travaux avec l’autorité que l’on sait. Je voudrais, en particulier, souligner l’hommage qui est dû au Président Colombo, qui a occupé ce fauteuil avec talent et s’est acquis, dans cette difficile mission, l’estime de tous. Le Parlement européen, tel qu’il a siégé, tel surtout qu’il a travaillé depuis la création de la première Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier, et en particulier depuis la constitution de l’Assemblée unique des Communautés en 1958, a joué dès l’origine un rôle important, mais aussi un rôle croissant dans la construction de l’Europe. Quelle que soit l’innovation profonde que représente son élection au suffrage universel direct, notre Assemblée est d’abord l’héritière des Assemblées parlementaires qui l’ont précédée. Elle s’inscrit dans le droit fil du sillon tracé par tous ceux qui ont siégé sur ses bancs depuis une génération, depuis que l’idée européenne et le principe démocratique se sont rencontrés. D’abord avec modestie et discrétion, compte tenu des pouvoirs limités que lui attribuait le traité de Rome, le Parlement européen a, grâce à l’influence politique croissante qu’il a su progressivement acquérir, consolidé son rôle dans les Institutions de la Communauté et dans la construction communautaire. C’est bien cette influence croissante qui a notamment conduit à la signature des traités du 21 avril 1970 et du 22 juillet 1975, qui ont renforcé le pouvoir budgétaire de l’Assemblée. En outre, par une série de dispositions pratiques, la participation de l’Assemblée à l’exercice des pouvoirs de la Communauté s’est structurée et développée. Cet acquis des précédentes Assemblées, le Parlement réuni aujourd’hui ne le perdra pas de vue. Aucun d’entre nous n’oubliera qu’il a contribué à la mise en oeuvre, conforme à l’espérance des fondateurs de la Communauté, d’« une union sans cesse croissante entre les peuples européens ». Si je me devais de rappeler ainsi, en quelques mots, l’oeuvre considérable des Assemblées qui nous ont précédés, il me faut surtout insister sur la novation profonde que constitue, au sein des Communautés européennes, la première élection au suffrage universel direct du Parlement. Pour la première fois en effet dans l’Histoire, dans une Histoire qui les a vus si souvent divisés, opposés, acharnés à se détruire, les Européens ont élu, ensemble, leurs délégués à une Assemblée commune qui représente aujourd’hui, dans cette salle, plus de 260 millions de citoyens. Ces élections constituent, à n’en pas douter, un événement capital dans la construction de l’Europe depuis la signature des traités. Certes, dans les différents Etats membres, les procédures électorales ont encore varié, conformément d’ailleurs à l’Acte du 20 septembre 1976 portant élection des représentants à l’Assemblée au suffrage universel direct, et c’est à nous qu’il appartiendra, en vue des élections futures, d’élaborer un mode de scrutin uniforme. C’est une tâche à laquelle je m’attacherai avec vous. La novation historique que représente l’élection du Parlement européen au suffrage universel, chacun de nous, quelle que soit son appartenance politique, a conscience qu’elle se produit précisément à un moment crucial pour les peuples de la Communauté. Tous les Etats de celle-ci sont en effet, aujourd’hui, confrontés à trois défis majeurs, celui de la paix, celui de la liberté, celui du bien-être, et il semble bien que la dimension européenne soit seule en mesure de leur permettre de relever ces défis. (Applaudissements.) Le défi de la paix, tout d’abord. Dans un monde où l’équilibre des forces a permis, jusqu’à présent, d’éviter le cataclysme suicidaire de conflits armés entre les superpuissances, on a vu se multiplier en revanche les affrontements locaux. La situation de paix qui a prévalu en Europe constitue un bien exceptionnel, mais aucun de nous ne saurait sous-estimer sa fragilité. Est-il besoin de souligner à quel point cette situation est nouvelle dans notre Europe dont les batailles fratricides et meurtrières ont constamment marqué l’Histoire ? Comme celles qui l’ont précédée, notre Assemblée est dépositaire de la responsabilité fondamentale de maintenir, quelles que soient nos divergences, cette paix qui est probablement, pour tous les Européens, le bien le plus précieux. Cette responsabilité, les tensions qui règnent dans le monde d’aujourd’hui la rendent plus lourde, et la légitimité que notre Assemblée tire du suffrage universel l’aidera donc à l’assumer en même temps, souhaitons-le, qu’à faire rayonner à l’extérieur la paix qui est la nôtre. Le second défi fondamental, c’est celui de la liberté. Sur la carte du monde, les frontières du totalitarisme se sont étendues si largement que les îlots de la liberté sont cernés par ces régimes où règne la force. Notre Europe est l’un de ces îlots, et il faut se réjouir qu’au groupe des pays de liberté qui la composent soient venus se joindre la Grèce, l’Espagne et le Portugal, aux vocations aussi anciennes que les nôtres. (Applaudissements.) La Communauté sera heureuse de les accueillir. La dimension européenne paraît, là encore, de nature à renforcer cette liberté dont le prix, trop souvent, ne se mesure que lorsqu’on l’a perdue. Enfin, l’Europe est soumise au grand défi du bien-être, je veux dire à la menace que constitue, pour le niveau de vie de nos populations, le bouleversement fondamental dont la crise pétrolière a été, depuis quelque cinq ans, à la fois le détonateur et le révélateur. Après avoir connu, pendant une génération, une progression des niveaux de vie dont le rythme élevé et soutenu n’avait existé à aucune période de l’Histoire, tous les pays d’Europe sont aujourd’hui confrontés à une sorte de guerre économique qui a débouché sur le retour d’un fléau oublié, le chômage, comme sur la mise en cause de la progression des niveaux de vie. Ce bouleversement conduit à des changements profonds. Dans nos différents pays, chacun pressent bien ces mutations, chacun les pressent mais les redoute. Chacun attend des gouvernements et des élus, au niveau national comme au niveau européen, des garanties, des sécurités, des actions propres à rassurer. Nous avons tous conscience que ces défis, ressentis d’un bout à l’autre de l’Europe avec la même acuité, ne peuvent être efficacement relevés qu’en commun. Seule l’Europe, confrontée aux super-puissances, a la dimension de l’efficacité, qui n’appartient plus, isolément, à chacun de ses membres. Mais la mise en oeuvre de cette efficacité implique que les Communautés européennes se consolident et se renforcent. Le Parlement européen, maintenant élu au suffrage universel, est désormais porteur d’une responsabilité particulière. Pour relever les défis auxquels l’Europe est confrontée, c’est dans trois directions qu’il nous faudra l’orienter : l’Europe de la solidarité, l’Europe de l’indépendance, l’Europe de la coopération. L’Europe de la solidarité d’abord, je veux dire de la solidarité entre les peuples, entre les régions, entre les personnes. Dans les rapports entre nos peuples, il ne saurait être question de mettre en cause ou d’ignorer les intérêts nationaux les plus fondamentaux de chacun des Etats membres de la Communauté. Mais il est certain que, bien souvent, les solutions européennes correspondent mieux à l’intérêt commun que les oppositions permanentes. Sans qu’aucun pays soit dispensé de la discipline et de l’effort qu’impliquent désormais, sur le plan national, les difficultés économiques nouvelles, notre Assemblée devra, sans relâche, recommander que soient réduites les disparités qui, si elles venaient à s’aggraver, condamneraient l’unité du Marché Commun et, en conséquence, la situation des plus privilégiés de ses membres. Cet effort de solidarité sociale, c’est-à-dire de péréquation économique et parfois financière, il s’impose aussi pour réduire les disparités régionales. Sur ce plan, la Communauté a déjà conduit des actions concrètes et efficaces. Cette politique devra être poursuivie, sous réserve que ses résultats soient toujours en rapport avec les sommes dépensées. Il faudra aussi adapter la politique mise en oeuvre pour corriger la situation des régions traditionnellement déprimées, ainsi que celle des régions considérées encore récemment comme fortes et prospères, mais aujourd’hui frappées par des sinistres économiques. Enfin, et surtout, c’est entre les hommes que les efforts de solidarité doivent être développés. En dépit des progrès réels et remarquables acquis dans ce domaine au cours des dernières décennies, il reste, sur ce point, beaucoup à faire. Mais, à une époque où, sans nul doute, il sera demandé à tous les citoyens d’accepter que le niveau de vie cesse de progresser ou progresse moins, d'accepter un contrôle dans la croissance des dépenses sociales, les sacrifices nécessaires ne seront acceptés qu’au prix d’une authentique réduction des inégalités sociales. (Applaudissements.) La finalité principale des actions qu’il faut mener dans ce domaine, tant au niveau communautaire qu’au niveau national, c’est l’emploi. Notre Assemblée devra consacrer une réflexion en profondeur à une situation nouvelle, où la demande s’accroît plus vite que l’offre. Il en résulte des frustrations et la nécessité, pour améliorer cette situation, de combiner les investissements productifs, la protection des activités européennes les plus vulnérables et la réglementation des conditions de travail. Notre Europe doit être également l’Europe de l’indépendance. Non qu’il lui faille affirmer une indépendance agressive et conflictuelle, mais parce qu’il est essentiel qu’elle puisse déterminer les conditions de son développement de manière autonome. Cette recherche s’impose avec une particulière clarté dans le domaine monétaire comme dans celui de l’énergie :Enfin, l’Europe que nous souhaitons doit être celle de la coopération. Les Communautés ont déjà mis en place, dans le domaine des relations avec les pays en voie de développement, une coopération souvent exemplaire, et dont une nouvelle étape vient d’être franchie par la négociation récente avec les pays associés. La Communauté souhaite maintenant que la nouvelle Convention de Lomé soit signée par tous les pays qui ont participé à cette négociation. Ajoutons que si le nouveau contexte économique mondial implique que cette politique de coopération soit renforcée, il suppose aussi que l’on tienne compte des disparités croissantes qui distinguent les pays en voie de développement entre eux, selon qu’ils sont ou non producteurs de matières premières. Dans le cadre de cette coopération sélective, l’Europe doit pouvoir obtenir les matières premières nécessaires à ses activités, offrir à ses partenaires de justes revenus, équilibrer les transferts de technologies auxquels elle doit procéder par des garanties d’égalité de concurrence pour ses industries. Parce qu’il est élu au suffrage universel et qu’il tirera ainsi de cette élection une autorité nouvelle, ce Parlement aura un rôle particulier à jouer pour permettre aux Communautés européennes de parvenir à ces finalités et de relever ainsi les défis auxquels elles sont confrontées. A cet égard, l’élection historique du mois de juin 1979 a soulevé en Europe un espoir, un immense espoir. Les peuples qui nous ont élu ne nous pardonneraient pas de ne pas savoir assumer cette responsabilité ô combien lourde, mais aussi ô combien exaltante. Cette responsabilité, le Parlement européen aura à l’exercer dans toutes ses délibérations. (Applaudissements.) Je voudrais cependant souligner combien à mon sens son autorité nouvelle le conduira à renforcer son action sur deux terrains : d’une part, exercer plus démocratiquement sa fonction de contrôle, d’autre part jouer plus vigoureusement un rôle d’impulsion dans la construction communautaire. (Applaudissements.) Issu de l’élection directe, le Parlement européen sera en mesure de jouer pleinement sa fonction de contrôle démocratique, qui est la fonction primordiale de toute l’Assemblée élue. Il lui appartient en particulier, du fait des pouvoirs qui lui sont conférés par les traités, de délivrer l’autorisation budgétaire au nom des citoyens de la Communauté. C’est désormais dans la Communauté, comme dans tous les Etats qui la constituent, l’Assemblée élue par le peuple qui vote le budget. Le budget est l’acte le plus important qui relève des compétences de ce Parlement, qui a le pouvoir de l’amender, voire de le rejeter en totalité. Je voudrais rappeler l’importance du dialogue budgétaire aux différents stades, aussi bien de l’élaboration du projet que de son adoption définitive. C’est une procédure complexe, lourde, supposant des délais, des navettes entre le Conseil et l’Assemblée, mais cette complexité et ces aller-retour ont pour contrepartie la possibilité de faire entendre notre voix. A diverses conditions toutefois : d’une part, à condition que nous soyons présents, puisque la présence est nécessaire. D’autre part, il est bien évident que notre force sera d’autant plus grande qu’elle sera plus unanime et aussi plus dépourvue de tout esprit de démagogie ou d’irréalisme. La première tâche inscrite au programme de ce Parlement consistera d’ailleurs en l’examen en première lecture de l’avant-projet de budget pour 1980, qui nous occupera incessamment. Si l’on examine de façon plus globale l’exercice des pouvoirs budgétaires du Parlement élu au suffrage universel direct, un point me paraît à souligner. Je veux dire qu’un Parlement responsable ne doit pas se borner, à l’occasion de l’élaboration du budget, à arrêter un montant de dépenses, mais doit aussi prendre en considération la perception des recettes. Cela n’est d’ailleurs que parfaitement conforme à la vocation démocratique qui est la nôtre. Nous savons qu’historiquement c’est par l’autorisation de la perception des recettes que se sont constitués les premiers parlements du monde. La question peut d’autant moins être éludée que nous savons que c’est au cours de cette législature que le budget de la Communauté européenne atteindra le plafond de 1 % de TVA fixé par les traités pour la perception des ressources propres. Dans les années à venir, le problème des recettes sera donc le problème primordial à prendre en compte, et ce Parlement, en tant que représentant de tous les citoyens, c’est-à-dire de tous les contribuables de la Communauté, sera nécessairement amené à jouer un rôle de premier plan en vue de sa solution. (Applaudissements.) Le Parlement doit également être un organe de contrôle de politique générale au sein de la Communauté. Ne croyons pas en effet que les limitations proprement institutionnelles de ses compétences peuvent empêcher un Parlement, tel que le nôtre, de faire entendre à tout moment, et quel que soit le domaine de l’action communautaire, la voix que lui confère l’autorité politique issue de son élection. (Applaudissements.) Il appartient aussi à notre Parlement de jouer un rôle d’impulsion dans la construction de l’Europe. Cela est particulièrement vrai à un moment où, ainsi que nous l’avons dit, l’Europe a d’abord besoin d’un complément de solidarité. Ce nouveau Parlement permettra aux voix de tous les citoyens de la Communauté de s’exprimer sur la scène européenne, contribuera en même temps à faire mieux ressentir aux différentes catégories d’entre eux les exigences de la solidarité européenne, au-delà des préoccupations immédiates, toujours légitimes, mais qui ne doivent jamais dissimuler les intérêts fondamentaux de la Communauté. Nous n’ignorons pas, bien entendu, l’organisation des pouvoirs, telle qu’elle existe dans la Communauté et confère à chaque institution son autonomie. Les fonctions d’initiative d’une part, de décision législative d’autre part, sont attribuées par les traités à la Commission et au Conseil. Cette autonomie de chacune des institutions, nécessaire au bon fonctionnement des Communautés, n’empêche pas que ces institutions agissent fondamentalement en collaboration les unes avec les autres, et c’est dans le cadre de cette collaboration que l’élan nouveau que représente pour la Communauté la légitimité nouvelle de cette Assemblée doit être un facteur efficace d’impulsion. C’est donc dans un renforcement du travail en commun avec les autres institutions que notre Parlement jouera plus efficacement son rôle pour les progrès de l’Europe. Il devra le faire aussi bien dans le cadre des consultations – qui peuvent être données sans limite -, que dans le cadre de la nouvelle procédure de concertation qui doit permettre au Parlement de participer effectivement aux décisions législatives des Communautés. (Applaudissements.) La voix de notre Assemblée, forte de sa légitimité, portera dans toutes les instances de la Communauté, et notamment au niveau le plus élevé de la décision politique. Je pense en particulier à ce sujet au Conseil Européen. (Applaudissements.) Comme il est naturel et normal dans une assemblée démocratique telle que la nôtre, nous divergeons par les programmes que nous souhaitons mettre en oeuvre, par les idées que nous voulons défendre et même quant à notre propre rôle. Gardons-nous cependant du travers qui nous conduirait à faire de notre Assemblée le forum des divisions et des rivalités. Trop souvent déjà, les Communautés européennes donnent à nos opinions publiques l’image d’institutions bloquées, incapables de parvenir dans les délais nécessaires à des décisions. Notre Parlement aura pleinement satisfait les espoirs qu’il a fait naître si, loin d’être le lieu de résonance des divisions internes de l’Europe, il parvient à exprimer et à faire percevoir par la Communauté l’élan de solidarité si nécessaire aujourd’hui. Pour ce qui me concerne, c’est la totalité de mon temps et de mes forces que j’entends consacrer à la tâche qui est devant nous. Je n’ignore pas que, bien qu’issus d’une civilisation commune et formés par une culture nourrie aux mêmes sources, nous n’avons nécessairement ni les mêmes conceptions de la société, ni les mêmes aspirations. Pourtant, je suis convaincue que le pluralisme de notre Assemblée peut constituer un facteur d’enrichissement de nos travaux et non un frein à la progression de la construction de l’Europe. Quelles que soient nos différences de sensibilité, je pense en effet que nous partageons la même volonté de réaliser une Communauté fondée sur un patrimoine commun et un respect partagé des valeurs humaines fondamentales. C’est dans cet esprit que je vous invite à aborder fraternellement les travaux qui nous attendent. Puissions-nous ainsi, au terme de notre mandat, éprouver le sentiment d’avoir fait progresser l’Europe. Puissions-nous surtout avoir pleinement répondu à l’espérance que suscite cette Assemblée, non seulement chez les Européens, mais parmi tous ceux qui, dans le monde, sont attachés à la paix et à la liberté. (Applaudissements nourris.)
- dans le domaine de la monnaie, nous soulignerons la signification politique majeure que revêt, pour l’Europe, la constitution récente du Système monétaire européen, destiné à établir, au sein de la Communauté, des relations monétaires stables affectées depuis quelques années par les incertitudes, fortuites ou non, du dollar ;
- dans le domaine de l’énergie, la dépendance des producteurs de pétrole constitue pour l’Europe un handicap majeur. Pour rétablir les conditions de notre autonomie, l’Assemblée pourra utilement inviter les gouvernements européens à affirmer ici un souci de coopération et de concertation qui a commencé bien tardivement à se manifester. Il faudra aussi amplifier les efforts d’économies et la recherche des énergies nouvelles.
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